Un audit de certification Qualiopi vu de l’intérieur

| Mis à jour le 15 septembre 2023 à 17 h 02 min
Un audit de certification Qualiopi vu de l’intérieur

Par Benoit Kriegel, Consultant, Auditeur et Formateur Qualité

Tous les acteurs de la formations professionnelles ont entendu parler de Qualiopi. Ses critères, ses indicateurs, son guide de lecture, ses preuves documentées… et ses audits ! Aujourd’hui je vous emmène à la rencontre de professionnels de la formation qui ont choisi d’obtenir la fameuse certification. Ils nous racontent comment ils ont vécu le processus de l’intérieur, de l’audit initial à celui surveillance. Leurs témoignages devraient éclairer ceux qui se demandent à quoi il faut s’attendre.

Je vous présente nos témoins, que je tiens à remercier d’avoir accepté de jouer le jeu et de nous partager leurs impressions :

  • Alexandra Hadjadj, Responsable Formation chez Cofrimi, à Toulouse
  • Myriam Petit, Formatrice et Gérante de Toilettage Canin, à Bordeaux
  • David Claverie, Responsable Formation de BSI Bureautique & Informatique, à Caen

La préparation de l'audit de certification

Comment vous êtes-vous préparés ?

Avant de se présenter à l’audit, il convient de se préparer. Il existe plusieurs écoles pour ce faire. Certains vont rechercher les textes réglementaires, trouver le guide de lecture, s’y plonger et favoriser un fonctionnement autonome.

D’autres, comme Alexandra, recherchent plutôt l’échange et le partage. « J'ai travaillé en groupe au début avec un petit réseau de partenaires, nous avons partagé un outil commun et discuté de nos pratiques ce qui a bien aidé. Les formations gratuites du Carif Oref par exemple, ainsi que l'audit préparatoire ont bien aidé à mieux cerner les critères et les attentes »

La troisième possibilité, c’est de recourir à un consultant, qui va expliquer le processus de certification, les exigences et accompagner l’organisme de formation dans la structuration et la mise en conformité de son organisation.

Utilisez-vous des outils logiciels ?

La préparation c’est aussi le moment de faire des choix. La certification Qualiopi impose la production et la gestion d’éléments de preuves documentés. Comment les produire et comment les gérer ?

Il y a deux principales écoles. La classique : production à la main et usage du papier, avec une problématique d’archivage. L’alternative : digitaliser un maximum de documents pour ensuite automatiser leur production et faciliter leur stockage.

Souvent on va privilégier l’option manuelle et papier au départ. Puis on va se rendre compte avec le temps et la pratique qu’un peu d’automatisation serait bénéfique.

C’est ce qui s’est passé pour Myriam qui après un audit initial compliqué a fait le choix « d’acheter le logiciel YPK pour mieux organiser mon travail et rester dans les exigences de Qualiopi, ce qui m'a beaucoup aidé à me sentir plus en confiance et mieux préparée pour l'audit [de surveillance].»

David lui aussi a suivi ce cheminement : « d’abord 100% papier, [mais] l’organisme de formation avait la volonté de dématérialiser, d'automatiser et de professionnaliser son processus administratif pour la prochaine échéance : l’audit de surveillance. »

A titre personnel je pense qu’il n’y a pas de meilleur choix dans l’absolu entre papier, dématérialisé, automatisation. Mais plutôt une question à se poser : comment puis-je être le plus efficace et efficient dans le contexte spécifique de mon organisme de formation et quelles ressources puis-je mettre en jeu ? La réponse peut être papier, elle peut être logicielle, elle peut aussi se situer dans un mélange des deux.

Ce qu’il faut bien comprendre, c’est qu’obtenir la certification Qualiopi, fondamentalement ce n’est pas difficile. Ce qui l’est en revanche, l’enjeu principal des organismes de formation certifiés, c’est de définir et déployer une organisation efficiente, rigoureuse et systématique, compatible avec les ressources disponibles.

Dans quel état d’esprit étiez-vous avant l’audit ?

A mesure que la préparation avance, l’audit se rapproche. Une période difficile pour Myriam : « Avant l'audit de [surveillance] Qualiopi, j'étais assez stressée. Mon expérience de mon premier audit n'avait pas été très agréable et j'avais peur de revivre cette situation. » 

Alexandra quant à elle a connu une évolution progressive : « Au tout début de la démarche, beaucoup de flou générateur de stress et d'irréalité à laquelle se sont ajoutés le COVID et l'allongement des délais (et un accouchement pour ma part). » Ensuite, avec la compréhension de l’attendu et grâce à sa préparation, elle a pu aborder l’audit avec sérénité.

David de son côté est plus rationnel. « Avant de passer l’audit de surveillance, l’organisme était dans les meilleures conditions pour répondre aux attentes ! Il fallait désormais expliquer et démontrer tout ce qui avait été mis en place en amont. »

Quand on se lance dans une démarche de certification en tant qu’organisme de formation, c’est un peu l’inconnu. On n’a peut-être jamais encore participé à un audit ! Il existe en conséquence un décalage entre notre perception de l’audit, les appréhensions et les risques qu’on y associe, et notre capacité à y faire face. La résultante de ce décalage c’est le stress.

Les témoignages d’Alexandra et David nous enseignent qu’une bonne préparation, le fait de se sentir en contrôle de leurs activités, s’est traduit par une réduction de ce stress. Si la préparation est menée de manière cohérente et pertinente, alors l’audit pourra même être abordé avec une certaine tranquillité.

Le jour de l'audit de certification

Comment débute un audit de certification Qualiopi ?

Le grand jour est arrivé. Que ce soit en présentiel ou en visioconférence, l’auditeur est présent, les audités également, on peut commencer !

Une réunion d’ouverture permet de valider le cadre, les horaires et les disponibilités des audités. L’auditeur en profite pour échantillonner quelques-unes de vos formations sur lesquelles vous devrez démontrer votre conformité.

Puis les indicateurs sont égrenés l’un après l’autre. Questions, réponses, enregistrement des éléments de preuves présentés s’enchainent pendant plusieurs heures.

Quel rôle joue l’auditeur ?

Le rôle de l’auditeur est crucial pour le bon déroulement de l’audit. Sur le plan technique bien sûr, pour la gestion du temps, mais encore plus aux niveaux relationnel et humain. Il exerce une énorme influence sur le climat dans lequel les échanges vont se dérouler.

« L’auditeur était très sympathique et m'a mise à l'aise dès le début » nous dit Myriam. « Au fur et à mesure que l'audit se déroulait, le stress a commencé à disparaître. J'ai pu expliquer le déroulement d'une formation tout en montrant mes documents de manière fluide et logique. Je n'avais pas l'impression de passer un examen, mais plutôt de partager mes connaissances avec quelqu'un qui était intéressé. »

Même son de cloche du côté d’Alexandra : « Pendant l'audit j'étais assez à l'aise, notamment grâce à la décontraction de l'auditeur mais aussi de voir que nous avancions sans difficultés dans les critères. »

Avancer sans difficulté induit que petit à petit l’écart va se réduire entre l’appréhension initiale de l’audit liée à l’inconnu et notre capacité à y répondre. On gagne en confiance et le stress s’évapore progressivement. On en vient même à tirer une satisfaction à apporter des éléments de réponses conformes.

Myriam et Alexandra soulignent l’influence exercée par la posture de leurs auditeurs. Mais les auditeurs, c’est comme tout : il y en a beaucoup qui sont très bien… Et il y en a quelques autres. Je suis moi-même passé par l’audit en tant qu’audité, pour ma société et pour une association dont je pilote l’activité formation et j’ai accompagné plusieurs clients à leurs audits. Je dois dire que j’ai eu droit à un panel d’auditeurs assez fleuri ! La majorité se sont montrés bienveillants, souriants et facilitants, tout en restant très professionnels. Mais j’ai aussi eu un cas d’exécution glaciale et méthodique, sans même un « Comment allez-vous ? » en arrivant.

Alors j’aimerais profiter de cette tribune pour rappeler aux auditeurs cette influence qui est la leur en audit de certification Qualiopi. Bien sûr un cadre méthodologique est à respecter, un mandat est donné et une mission doit être réalisée. Mais souvenez-vous qu’en face de vous, vous avez des personnes qui souvent ont découvert la qualité récemment et pour qui cet audit est peut-être le premier. Amener de l’empathie et de la bienveillance va faciliter le déroulement de l’exercice, mettre en confiance les audités et, j’en suis convaincu, sert les intérêts de la démarche qualité.

D’ailleurs, petit clin d’œil aux audités : sachez que les auditeurs aussi sont stressés au démarrage d’un audit ! Vous aussi vous avez le pouvoir de faciliter son déroulement, notamment de par l’accueil fait à votre visiteur.

Comment connait-on le résultat de l’audit ?

En fin d’audit, lors de la réunion de clôture, on est généralement marqué par l’expérience mais on s’intéresse avant tout au résultat. Normalement il n’y a pas de surprise car l’auditeur informe des constats et des non-conformités au fur et à mesure du déroulement de l’audit. La réunion de clôture a pour but de les récapituler avant de se séparer et de préciser les modalités et temporalités de traitement de ces éventuelles non-conformités.

Après l’audit de certification

Quels étaient vos ressentis ?

L’audit est terminé. L’auditeur s’en est allé. Sous réserve de traitement administratif de votre dossier vous allez obtenir votre certification Qualiopi : félicitations ! A ce moment les émotions sont habituellement diamétralement opposées à celles du début.

« Après l'audit, j'ai ressenti un sentiment de satisfaction et de soulagement. J'étais heureuse d'avoir répondu aux attentes de Qualiopi de manière claire et cohérente. Grâce à tout cela, j'ai réussi à passer cet audit [de surveillance] avec succès et à me sentir plus confiante pour les audits à venir » nous dit Myriam.

Alexandra de son côté, à l’issue de son audit initial, est « très fière de n'avoir reçu aucune non-conformité mais consciente du travail qu'il reste à fournir. »

Dès l’audit terminé, l’heure est au soulagement, à la joie, à la fierté. Je vous invite à les ressentir pleinement car vous le méritez bien !

Mais comme le dit Alexandra, on réalise souvent à la fin de l’audit initial que ce n’est que le début. Une première étape est franchie certes, mais elle reste une première étape. La période auditée couvre en général seulement quelques mois. Dorénavant, l’organisation conforme va devoir être reproduite pour toutes les formations, pendant au moins 3 ans.

Quels sont les enjeux de la certification Qualiopi ?

Il y a un message que je répète dans mes accompagnent d’organismes de formation vers la certification Qualiopi : l’enjeu n’est pas de réussir l’audit initial. L’enjeu n’est pas d’être certifié. Vous le serez. L’enjeu c’est de trouver une organisation efficace et efficiente.

Plusieurs facteurs peuvent être facilitants. Le principal est de bien réfléchir au pourquoi de votre démarche. Saisissez l’opportunité de la qualité pour faire progresser votre organisme de formation. Sortez du seul objectif de certification. Car Qualiopi vous invite à réfléchir à vos pratiques et à votre organisation. C’est l’opportunité de vous améliorer, plus que la contrainte de conformité, qui devrait vous guider.

Avec cette perception la démarche qualité devient un investissement et vous allez chercher à optimiser son retour. Un bon moyen de procéder c’est d’analyser ce qui a bien et moins bien marché lors de chaque audit. Puis de mener des actions d’amélioration sur ce qui doit évoluer en y allouant des ressources adéquates.

La gestion administrative et documentaire est un aspect à regarder de près car elle nécessite d’y consacrer un temps et une énergie conséquents. Un premier audit « 100% papier » a fait réaliser à David la nécessité de dématérialiser et de mettre en place un logiciel de gestion administrative. « Avant Hop3team, l’organisme de formation consacrait deux à trois jours de travail par semaine pour gérer l’ensemble des démarches administratives (Contrat, Convention, Convocation, Attestation, etc…).  Aujourd'hui… une matinée suffit ! L’investissement de l’équipe dans le projet et l’audit de surveillance ont permis de confirmer que tout le travail effectué en amont était payant. Grâce à l’outil de gestion […], l’équipe est structurée et améliore en permanence ses process internes. »

Le documentaire est un des principaux irritants de Qualiopi. Alexandra le reconnais d’ailleurs : « je n'ai jamais eu l'impression que la démarche qualité en elle-même était inutile, néanmoins, j'ai parfois été déconcertée par les [preuves de] mises en œuvre demandées qui permettaient seulement de cocher des cases et ne garantissaient pas forcément une qualité réelle. »

Pour autant la démarche qualité ne se résume pas à la conformité à des exigences. En lui affectant une dimension stratégique et en se donnant les moyens de gérer efficacement les irritants, alors elle peut permettre aux organismes de formation de s’inscrire dans une démarche de progrès vertueuse, de satisfaire et pérenniser leur clientèle et de se démarquer de la concurrence.

Benoit Kriegel

Benoit est consultant, auditeur et formateur en management de la qualité ainsi que gérant de la société beQua, organisme de formation certifié Qualiopi. Il a construit son parcours dans les secteurs industriels de l’automobile, l’emballage agro-alimentaire, la plasturgie et dans la formation professionnelle. Il intervient aujourd’hui principalement sur le référentiel ISO 9001 dans tous secteurs d’activité et sur le Référentiel National Qualité (Qualiopi) dans les organismes de formation. Il prône une approche simple, agile et sexy de la qualité, indispensable selon lui pour obtenir l’adhésion et l’engagement tant des dirigeants que des collaborateurs.

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